Visas, tourisme et petites soirées iraniennes 

Le moment un peu redouté est arrivé. Nous sommes à Téhéran et c’est ici que nous ferons toutes nos demandes de visas pour l’Asie Centrale. Une pause d’une dizaine de jours au minimum est à prévoir. 
C’est donc parti pour le marathon des ambassades dans cette ville tentaculaire qu’est Téhéran. 

La Chine change de règle tout le temps, on passera donc notre tour bien que notre dossier soit totalement prêt, il nous fallait arriver à la frontière dans les 3 prochains mois. On ne sait même pas si on y arrivera alors ça faisait short ! 

Pour le Turkménistan, prochain pays sur notre parcours, il nous faut le visa de l’Ouzbékistan. Ce dernier est facile à obtenir mais il faut attendre 8 jours ouvrés. Si on ajoute les week-ends, les horaires d’ouverture (9h-11h), les multiples passages à l’ambassade de France pour avoir des lettres de recommandation, cela devient vite un casse tête d’organisation. Heureusement que de nombreux sites internet de voyageurs partagent leurs expériences (où trouver une photocopieuse couleur, le nombre de photos d’ identité, les vraies horaires d’ouvertures des ambassades etc…) pour s’y retrouver. Jusqu’à obtention du visa Turkmene, nous aurons une petite angoisse car le taux de refus est d’environ 50%, nous avons demandé de le récupérer à Mashad, soit 200km avant la frontière. Nous allons donc rouler les dix jours suivant notre demande sans savoir si nous pourrons franchir la frontière. 

  • Tout cela nous a permis de nous reposer chez Hamid (notre sauveur de vélo) puis chez son cousin Reza, pilote d’avion et amateur de vin rouge qu’il confectionne lui même dans son appartement. Et franchement on s’est bien régalé. Son vin n’a rien à envier aux grands crus français, mais c’est normal quand on connaît les secrets de fabrication. Raisin de qualité, décortiqué à la main entre amis en écoutant du classique. Les gens stressés sont interdits de manipulation pour ne pas donner de mauvaise énergie au vin. Et ça marche ! 😋🍷

L’avantage de passer du temps chez des iraniens c’est de découvrir la cuisine iranienne. En effet, dans les restaurants, on ne trouve que des chicken ou meat kebab avec du riz. C’est très bon, mais ce n’est pas très élaboré ! Mais super efficace pour le vélo ! La cuisine iranienne utilise de nombreuses épices et herbes, le safran est également à l’honneur ainsi que la rose et la fleur d’oranger. Les fruits secs et les oléagineux (noix en particulier) sont aussi présents dans de nombreux plats en sauce. On a noté quelques recettes et on espère bien les partager avec vous au retour ! 

Depuis plusieurs semaines, l’ambiance en Iran est très animée par les élections présidentielles et locales qui ont le lieu le 19 mai.  Initialement il y avait 6 candidats mais au fur et à mesure la liste diminue. L’idée étant de soutenir un candidat et d’obtenir ainsi plus de temps de parole pendant les débats. Deux camps s’affrontent : les réformateurs incarnés par Rohani (président en place depuis 2013) et les conservateurs de Raesi (hostiles à l’occident et à l’ouverture du pays). On aura vécu de l’intérieur cette élection car les Iraniens parlent très facilement de politique. On nous demande d’ailleurs très souvent notre point de vue sur l’Iran. 

Pendant les premières semaines de notre passage en Iran, nous avons donc été accompagnés par les photos des candidats, été accueillis en ville en musique, avec distribution sur le bord de la route de gâteaux et de jus pour soutenir les candidats locaux et pour les présidentielles. Et en vélo cela donne un sacré bordel car tout le monde veut son petit jus et son gâteau quitte à faire un nombre incalculable de queues de poisson aux pauvres petits cyclistes que nous sommes ! 

Ici les gens affichent clairement leur camp. Quand on rentre dans un magasin, on sait de suite pour qui vote le patron 😊

Le système démocratique iranien est assez original puisque que c’est une des seules démocraties du moyen orient mais qu’elle est chapeautée par le Guide Suprême (autorité religieuse) qui lui n’est pas élu par le peuple. Ce dernier avec le conseil des gardiens valident les candidats qui se présentent à l’élection présidentielle. On a donc une élection démocratique sur la base de candidats validés uniquement par le guide suprême Khamenei. Les gens nous expliquent donc très souvent que le « gouvernement » est très mauvais (faisant référence au pouvoir du clergé)  mais que Rohani fait avancer les choses dans le bon sens (accord sur le nucléaire, ouverture à l’Europe et aux US aidée par Obama). On a vraiment senti chez les gens une envie d’avancer et de retrouver la grandeur de l’Iran d’avant la révolution islamique de 79 qui a conduit le pays à se renfermer sur lui même. 

Le petit tips des pralines pour savoir comment les gens votent : si les gens écoutent du Rap ou Rihana dans leur voiture, ils votent Rohani. Si les gens ne s’adressent qu’à Martin quand ils nous parlent, ils votent Raesi. Si on nous propose du vin ou whisky alors on est dans une famille qui vote Rohani 😊

On s’est vraiment fait de très bons amis ici (un peu les Buddy buddette de Téhéran ^^) . On pense déjà à revenir en Iran par les retrouver,  pour faire de la randonnée, découvrir le sud en hiver.  Reza, notre deuxième hôte à Téhéran, sort tous les soirs avec ses amis : « We will die » comme il aime répéter ! 

Ispahan 

Profitant de notre pause forcée pour obtenir le visa Ouzbékistan, nous décidons de faire une petite escapade au centre du pays dans les villes réputées de Yazd et Ispahan. 

Ispahan a été à la hauteur de nos attentes, cette ville est magnifique et nous laissera de très jolis souvenirs. Nous avons en effet fait la connaissance de Mahsa dans le bus qui nous a invité chez elle. On a ainsi rejoint Mahdi un de ses amis à Ispahan.  

Difficile de ne pas tomber sous le charme de la grande place Naghsh-e Jahan (petite dédicace à Victor qui rêve de manger un macaron sur cette place 😋). Ici le calme règne (asse rare en Iran), on aime s’asseoir et regarder autour de nous sans rien faire. On a eu un vrai coup de foudre architectural (même effet que Venise ^^). 

C’est aussi le jour des élections que nous visitons Ispahan. Du coup, certaines mosquées sont fermées aux visites pour que les gens puissent y voter. Il y avait du monde ! 

Dernier repas en famille à Ispahan avec le suivi des résultats de la présidentielle en live à la TV. La tante de Mahdi est archéologue et est responsable pour l’unesco de la place Naghsh-e Jahan. Encore une soirée très intéressante ! Petit vin arménien, pizza et coca 😋

Yazd

Pour notre court séjour à Yazd, nous nous sommes offerts une petite guest house qui nous surtout permis de nous coucher aux heures françaises et non pas tard comme les Iraniens. Quel bonheur de dormir ^^

Yazd est une petit ville au milieu du désert qui possède des vestiges et temples zoroastriens, religion pré islamique en Iran. 

Yazd est composé de petites ruelles formées par les maisons en pisé. Il est agréable de s’y perdre, à l’ombre car ici c’est la fournaise ! 

Après toutes ces belles aventures, c’est reparti vers l’est de l’Iran ! 🚴‍♀️🚴‍♂️

L’Iran, un pays à deux visages… 

« L’invité est un ami de Dieu » comme le dit un proverbe irannien.

Dès le passage de la frontière entre Arménie et Iran le charme opère : les sourires, les Hello, les « Where are you from ? », rythmeront désormais nos journées. Alors la légère inquiétude au passage de frontière est vite dissipée. Pour Flo c’était en particulier un sentiment mitigé à l’idée de se voiler et pour Martin un questionnement par rapport à l’image que l’on a de l’Iran : un pays très fermé. Allait-on nous bombarder de questions sur le but de notre voyage ? Eh bien non, on nous a juste demandé nos professions et le nom de nos papas respectifs. Comme depuis septembre 2016 il est interdit aux femmes de faire du vélo on se demandait quel serait le regard des iraniens. Eh bien ils s’en moquent (pour nous tout du moins) et nous avons appris ici que des groupes de femmes courageuses bravent l’interdit et continuent à pratiquer leur sport préféré. Nous n’en avons malheureusement pas croisées et n’avons vu que des hommes à vélo. 

 

On découvre aussi un pays multi ethnique dans lequel les perses constituent « seulement »  un peu plus de la moitié de la population. Nous sommes arrivés par l’Azerbaïdjan oriental, région turque d’Iran. Les turcs d’Iran (azeris) sont entre 15 et 20 millions dans un pays qui compte 80 millions d’habitants. Ils vivent principalement au nord ouest, région par laquelle nous arrivons en Iran. On est donc tout content de pouvoir réutiliser notre petit vocabulaire turc ! 

L’Iran est constitué d’une mosaïque d’ethnies différentes (Perses, turcs azeris, kurdes, arabes, lors, pachtos, baloutches, arméniens, caspiens). 

La culture iranienne est un socle commun mais chaque ethnie a ses spécificités, ce qui pour nous est très intéressant car tout le monde tient à nous expliquer les différences culturelles. Il faudra par contre revenir pour découvrir toute l’Iran car c’est un pays immense ! (3 fois la France). Pour les gens qui aiment les cartes comme Martin (La famille Chevalier par exemple ?), on vous recommande vivement le site Iran Carto réalisé par le Cnrs et en partie par l’excellent géographe Bernard Hourcarde qui a écrit plusieurs ouvrages sur l’Iran. 

L’Iran est un pays extraordinaire, un pays extrêmement touchant, un pays dans lequel on sent bien, heureux, en sécurité. On retrouve beaucoup de similitudes avec la Turquie, mais les Iraniens sont encore bien plus curieux que les turcs… Et c’est un euphémisme ! Peu habitués à voir des touristes, les Iraniens nous stoppent sans arrêt sur la route pour prendre des photos, des selfies avec tous les membres de la famille, pour nous ravitailler de jus de fruits, de gâteaux, de pain etc… Il nous faut apprendre à ne pas systématiquement s’arrêter pour pouvoir avancer un peu sur la route ! Ici, impossible de manquer de quoi que ce soit. Nous avons vite appris qu’il ne faut pas avoir trop de provisions dans nos sacoches au risque de les voir vite déborder des cadeaux accumulés ! 

En Iran aussi, le thé est une grande tradition même s’ils en boivent moins qu’en Turquie. Des gens chez qui on était invité nous ont dit qu’on buvait le thé comme les turcs. Sacré compliment pour nous 😀 On a même appris qu’ils avaient des plantations de thé et de riz le long de la Caspienne… Si on avait su, on y serait allé faire un tour. Pour la prochaine fois ! 

Tabriz est la première ville au nord que nous traversons. Elle nous permet de faire une petite halte, de racheter nos pneus perdus et de se perdre dans le plus grand bazar couvert au monde (rien que ça !). Les tapis de Tabriz sont très réputés et sont vraiment superbes. 

Les iraniens sont très touchants, ils sont sincèrement heureux de nous voir venir de si loin pour découvrir leur pays et cela nous plonge dans un sentiment de sérénité car on se sent très rapidement comme chez nous. Traverser une frontière et s’acclimater à un nouveau pays, ses codes, sa culture nous demande toujours quelques jours.  S’adapter à l’Iran est très simple pour le voyageur qui aime rencontrer des gens et discuter. Pour nous c’est un véritable bonheur d’être ici, et on savoure précieusement car on sait que la suite du périple sera différente. 

C’est très agréable de se sentir en sécurité, de savoir que quoi qu’il arrive, on nous aidera toujours, il y aura toujours une solution. Voyager à vélo c’est être dans une sorte d’inconnu permanent : on ne sait jamais ce qu’il va nous arriver, on ne contrôle pas grand chose à part notre direction. Lorsque l’on part le matin, on ne sait jamais où l’on va dormir le soir. Cette « inconnu » n’est pas désagréable, mais en Iran il est très simple à gérer. Depuis le début de notre voyage nous n’avons jamais été aussi en confiance dans un pays. Et quel comble face aux préjugés tenaces sur ce pays. On aime vraiment l’Iran. 

C’est la première fois que les familles se disputent notre venue, ou viennent vers nous systématiquement  pour nous inviter à manger, à dormir. On arrive dans un village ou une ville, on regarde notre plan et en 5min une dizaine de personnes sont autour de nous pour nous parler et nous inviter ! C’est très rigolo et touchant même si parfois on a besoin d’un peu d’intimité et de calme et que dans ce cas là il faut faire preuve de malice et de persévérance ! En effet le rythme iranien n’est pas tout à fait adapté au vélo puisque l’heure de coucher classique est entre 1h et 2h du matin ! Alors quand on rajoute l’excitation d’avoir des invités étrangers on ne vous dit pas ! 

En Iran il est très courant de camper dans les parcs municipaux, bien pratique pour nous ! Il y a un seul modèle de tente en Iran qui ressemble à une tente 2 secondes alors on détonne un peu avec notre hubba hubba ! 

Beaucoup de gens parlent anglais ici, et encore plus parmi les jeunes ce qui contraste fortement avec la Turquie. Du coup, nos échanges sont très intéressants, et on apprend énormément sur la diversité du pays, sa culture et la politique qui passionne les Iraniens. « Are you happy with Macron? », alors on explique la complexité de notre système et la composition de notre nouveau gouvernement hihi. En tout cas les iraniens semblent rassurés de voir Macron au pouvoir plutôt que Le Pen 😉 On est surpris de voir à quel point les Iraniens suivent la politique étrangère !  

Si les Iraniens sont très heureux de nous voir pédaler dans leur grand pays, il est important pour eux de savoir quelle est notre opinion et notre vision de l’Iran. Une question qui revient quasi systématiquement est de savoir comment on voyait l’Iran avant de venir et après. Ils sont très attristés et souffrent de la mauvaise image qu’ils ont en occident et ont à cœur de démontrer le contraire. Malheureusement Trump, en Arabie-Saoudite,  vient encore de qualifier l’Iran de pays soutenant le terrorisme tout en vendant 110 milliards de dollar d’armes aux Saoudiens … Cela ne va clairement pas aider à un apaisement dans la région … Cela nous fait mal au cœur, les iraniens ne jurent que par la paix et l’amitié entre les pays, ils sont beaucoup à nous l’avoir expliqué.  

Les iraniens que l’on a rencontré sont extrêmement ouverts d’esprit. On le découvre davantage une fois franchie la porte des maisons. Il existe bien deux Iran : celui de l’extérieur et celui de l’intérieur, du cercle familial, du cercle des amis. Les voiles tombent au sens propre et au sens figuré et les langues se délient encore plus (les iraniens sont très bavards).  On découvre un Iran bien plus occidentalisé que ce que l’on pensait. La religion n’est pas du tout omniprésente comme elle peut l’être en Turquie par exemple. Malgré certaines interdictions officielles, les Iraniens sont très libres et nous parlent ouvertement de plein de sujets divers. 

En étant invités chez les gens, on découvre aussi ce que les Iraniens appellent le « Ta’arof ».  Deux exemples que nous avons vécu : pour savoir si l’on est vraiment invité il faut d’abord refuser deux ou trois fois la proposition. Si notre interlocuteur réédite son invitation c’est qu’elle est vraiment sincère. Sinon c’est qu’il ne veut pas nous laisser dans l’embarras mais ne souhaite pas nous inviter chez lui. Ou alors le commerçant refuse que l’on règle nos achats et nous devons insister plusieurs fois pour payer. Nous expliquons aux iraniens qu’ils devraient se méfier avec nous touristes car sans connaitre le ta’arof nous pourrions accepter la proposition directement et être très impolis à leurs yeux !

Comme si bien évoqué dans un guide culturel de l’Iran (offert par un iranien est il besoin de le préciser ? 😊) « Les iraniens évoquent la terre pour parler du ciel, et leur affabilité laisse croire qu’ils se révèlent, alors que la politesse est un jeu de miroirs et de masques. […] Pour l’occidental habitué à l’efficacité, à la franchise et à la transparence de sa vie quotidienne et des rapports humains, la mentalité orientale semblera tortueuse, compliqué et incompréhensible. La logique iranienne n’est pas illogique ou irréaliste, mais elle n’obéit pas à notre rationalisme. Elle rappelle que le monde est relatif et illusoire et qu’il ne se laisse pas capturer dans des notions trop affirmatives et rigides.  » 

Nous n’avons bien sûr qu’entrevu ces subtilités mais quelle belle leçon pour appréhender d’autres cultures et relativiser nos réactions, nos habitudes. 

L’hospitalité iranienne est sans aucun doute ce qui nous marque le plus depuis notre arrivée dans le pays. Tout le monde nous donne son numéro de téléphone : « If you have any problem, just call me », on a des contacts dans tout le nord de l’Iran maintenant, on est même obligé de prendre les gens en photo pour se rappeler qui nous a donné son numéro de téléphone 😀 On s’est fait de vrais amis ici en Iran, on espère en voir beaucoup nous rendre visite à Paris. 

La route vers Téhéran est longue et très droite… C’est l’occasion de faire quelques records dont une longue journée à 155km ! 

Allez, derniers coups de pedales pour Téhéran ! 

Petite dédicace au cousin de Martin qui est Boulanger. Ici les pains sont différents de ceux de Nils mais aussi très bons. Ils sont cuits au four à bois. Notre ami à Téhéran va choisir ses graines au marché et demande au boulanger de lui faire ses petits pains personnalisés. Martin était tout fier de lui raconter que son cousin était, lui aussi, boulanger ! 

La gazette du mécano en Iran

Un bon voyage à vélo s’accompagne forcément d’une bonne gazette du mécano ! Sachant que nous partions vers l’Asie Central nous avions tout préparé pour pouvoir réparer au maximum nos vélos de manière autonome. Une petite sacoche entière de Martin y est consacrée : câblage pour freins et derailleurs, freins, boîtier de pédalier, outils, lubrifiant etc… De quoi prendre soin de nos jolies montures qui n’ont toujours pas de noms. D’ailleurs n’hésitez pas à nous proposer des idées en commentaire !

Pour anticiper les pires problèmes et avec l’expérience de notre précédent voyage en tandem, durant lequel un de nos pneus avait explosé, nous sommes partis cette fois ci avec un joli pneu de secours difficile à trouver en Asie centrale. Ce dernier peut être vu sur nos photos du début de voyage… Oui car en Arménie, notre pneu de secours est resté dans un champ après qu’on l’ait négligemment oublié en rangeant la tente.

Le début du voyage en Iran est donc rythmé par une recherche de pneus, étant donné que c’est le dernier pays où l’on pourra trouver facilement le graal du pneu : les fameux « Marathon Plus Tour » quasi increvables de Schalwbe.

Nous allons donc trouver notre bonheur dans deux magasins de Tabriz, première grande ville iranienne sur notre chemin.

C’est au magasin « Saeed Mohammadi Bike Shop » que l’on peut trouver du shimano et autres composants de qualité.

Mais c’est chez « Alamir Commerce » que l’on trouvera nos pneus parmi une très large sélection de pneus Schalwbe ! Ce sont des vrais passionnés de vélo, qui tiennent leur boutique depuis 3 générations. En tant qu’amateur de vélo et de bricole, on se sent à la maison ici 🙂 Du coup, on en a pris deux pour être tranquilles pour la suite !

Mais voilà qu’après à peine 1700km, la roue libre de Martin montre déjà des signes de fatigue ! Alors pour les non geek de vélo, la roue libre se situe dans le moyeux de la roue arrière. C’est ce qui permet de ne pas pédaler en descente, et ne pas être « fixé » à la roue arrière comme sur les tricycles pour enfants ou les fixie pour les plus grands enfants bobos ^^

Lorsque la roue libre se bloque dans une descente à 60km/h, cela fait très bizarre ! Il faut alors se mettre à pédaler super vite et ralentir aussitôt ! On avait déjà eu ce problème avec le tandem mais c’était passé après quelques kilomètres (@Pierre-Alain, je te conseillerais tout de même d’ouvrir la roue libre pour la nettoyer et vérifier que tout va bien, cela peut être dû à un petit cheveu ou fil coincé).

Première halte de réparation du voyage en pleine nature. Martin tente de lubrifier la roue libre, mais cela est difficile sans démontage.

Normalement, les moyeux shimano XT sont censés être de grande qualité (gamme XT) , mais on apprendra par la suite que les deniers modèles sont très mal adaptés pour les velos de randonnée car peu robustes. En effet, pour gagner en poids, Shimano a décidé de mettre des composants en aluminium au lieu de l’acier. Il est vrai que depuis le début du voyage nous n’epargnons guère nos montures, mais la durée de vie annoncée par shimano est autour de 10.000 à 20.000km. En lisant les forums et les commentaires des sites marchands, on retombe sur beaucoup de témoignages similaires de gens qui ont eu le même problème avec la roue libre du moyeu Shimano XT. Peu rassurant… D’autant plus que les roulements ne sont pas protégés contre l’humidité, boue etc… Quand on a ouvert le moyeu de Martin, on a pu constater cela… Du coup, on vous recommande de repasser sur une gamme de moyeux LX qui apparemment serait encore en acier (cf. Forums) voire de passer aux moyeux DT Swiss bien plus onéreux avec lesquels Martin avaient longuement hésité lors du montage… Le choix des moyeux est primordial pour un vélo de randonnée, car un voyage ne les épargne guère.

Dans l’impossibilité d’ouvrir la roue libre de Martin, c’est parti pour une session de jeep organisée par une dizaine d’iraniens souhaitant nous aider. En route vers Zanjan qui possède quelques magasins de vélos un peu mieux équipés.

Et là, le drame… Un des ressort et 2 cliquets sont déjà cassés !

L’équipe décide alors d’enlever les pièces cassées pour nous permettre d’aller à Téhéran chez un ami distributeur de vélos et de pièces de vélos pour l’Iran. Martin sera tout fou d’arriver dans cette caverne d’Ali Baba du vélo et de pouvoir réparer son vélo avec du bon matériel.

Et nous voilà chez Hamid, connu en Iran car importateur de vélos. Un mécanicien de l’équipe nationale de cyclisme d’Iran s’occupe de changer le moyeu et de rayonner la roue arrière de Martin. Nous voilà rassurés et prêts à repartir vers l’Asie centrale !

Il faut être honnête, sans l’aide de tous les iraniens qu’on a rencontré, cela aurait été dur. Ils ont tous fait des pieds et des mains pour nous aider ! Alors un grand « Merci » comme on dit en Iran 🙂

(Pour information, internet en Iran c’est pas très efficace, du coup c’est assez compliqué d’écrire des articles.  Mais on espère donner des nouvelles un peu moins « techniques » rapidement)

Une escapade au Haut-Karabagh

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Col de Sotk entre le lac Sevan et le Karabagh

Après 3 jours passés au bord du lac Sevan en Arménie, c’est avec joie que nous sommes arrivés au Haut-Karabagh ou Artsakh en arménien. C‘est un pays globalement non reconnu par la communauté internationale : Google maps nous identifie par exemple en Azerbaïdjan. Mais sur place le pays est complètement contrôlé par l’état du Karabagh (Nagorno-Karabagh). Il faut d’ailleurs un visa officiel délivré au ministère situé à Stépanakert – capitale du Karabagh – pour pouvoir s’y rendre.

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Welcome to Karabagh !

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Une bonne heure de descente sur piste c’est assez épuisant !

On s’est fait plusieurs fois contrôler dans la région, et la situation était toujours marrante car nous n’avions pas de visa avant d’arriver à la capitale, du coup après plusieurs coups de téléphone, les militaires qui nous contrôlaient nous expliquaient qu’il fallait qu’on aille à la capitale. Mais en vélo ça prend du temps 🙂

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Pendant la période soviétique, cette région a été rattachée à l’Azerbaïdjan bien que principalement peuplée d’arméniens. A la chute de l’URSS, la Géorgie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan ainsi que la région du Karabagh proclament leur indépendance. L’armée azérie souhaite conserver son contrôle sur le Karabagh et envoie son armée… c’est le début d’un long conflit….

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La guerre cesse en 1994 mais il existe encore aujourd’hui des tranchées au niveau de la frontière non reconnue. Les tensions ont repris depuis 2016 avec des morts de chaque côté. La TV arménienne consacre une grande partie de ces programmes à cette « guerre de tranchée »… Au Karabagh, on croise des monuments avec des tanks, des canons pour la mémoire des morts. On sent que la ligne de front et le conflit sont dans tous les esprits.

De manière générale en Arménie ou au Karabagh, on nous parle souvent des azeris, les gens veulent s’assurer qu’on « n’aime pas » les azéris ou qu’on n’a pas l’intention d’y aller. De toute façon, maintenant avec notre visa de la république d’Artsakh, on ne peut plus se rendre en Azerbaïdjan. Cela nous rappelle les balkans, où le sujet de la guerre revenait souvent.

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Le long canyon qui descend depuis le col de Sotk

Nous avons dormi chez Sonia, une jeune mamie qui habite au Karabagh. Elle avait perdu 4 de ses 5 enfants ainsi que son mari pendant la guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Elle a fui Baku (Azerbaïdjan) pour s’installer au Karabagh. Très touchante rencontre… On pense qu’elle nous avait vu avec son grand camion russe lors de la descente du canyon et qu’elle s’était mise au bord de la route pour nous inviter.

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Petit déjeuner avec Sonia dans son jardin au pied du monastère de Dadivank

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Monastère de Dadivank

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Dadivank

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Le pays est donc peuplé majoritairement d’arménien et reste difficile d’accès… ce qui en fait un petit paradis pour les cyclistes ! La nature est préservée et magnifique. Montagnes, rivières, canyon, paysages à couper le souffle surtout après notre bref séjour au lac Sevan en altitude, cela nous a fait du bien de retrouver un peu de verdure, et de belle nature.

Nous avons passé une soirée du 24 avril arrosée dans un petit village à parler encore une fois de l’amitié franco-arménienne, de Sarkozy, d’Aznavour (encore et toujours) et surtout, ce soir là, du génocide arménien. En effet le 24 avril est la date de la commémoration du génocide arménien.

Entre 1915 et 1916 le mouvement des jeunes turcs (qui donnera naissance à la Turquie actuelle suite à l’effondrement de l’empire Ottoman) ordonna la déportation de milliers d’arménien. Cela eut pour conséquence la mort d’environ 1,2 d’arméniens qui vivaient alors dans l’est de la Turquie actuelle. C’est un sujet sensible et très important pour la communauté arménienne car la reconnaissance du génocide est encore sujet à controverse. La Turquie refuse actuellement de reconnaître cet épisode de son histoire…

Après avoir été sous le joug de l’empire russe, les arméniens subissent de plein fouet la chute de l’empire ottoman avec les ambitions turques, puis l’arrivée d’un nouvel « empire » qu’est l’URSS. L’éphémère « République d’Arménie » entre 1918 et 1920  qui s’installe sur les territoires de la grande Arménie historique ne sera qu’un court rêve puisque la Turquie puis la Russie bolchevique ne feront qu’une bouchée de ce petit pays.

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Nous nous sommes offerts une petite journée de pause dans la capitale pour faire nos visas, déguster les bons petits plats arméniens et surtout faire un gros dodo après une bonne douche chaude !

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Tu joues, tu gagnes un paquet de clopes !

Et c’est ensuite reparti pour les cols et grandes montées qui caractérisent aussi le Karabagh !

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Et tout redevient vert en dessous de 1600m ou comment changer de saison en une journée !

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Frontière Karabagh-Arménie

Une dernière nuit passée à la frontière avec un petit feu pour se réchauffer car les nuits sont encore fraîches à cette période ! Et les loups étaient encore de la partie cette nuit là… (mais mamounette ne t’inquiète pas ils s’attaquent aux chiens dans les villages mais pas aux tentes de cyclotouristes ^^ surtout qu’on ne sent pas toujours très bon !)

 

Les montagnes russes arméniennes

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L’arrivée en Arménie est assez naturelle en venant de Géorgie, la culture étant assez proche. Le choc de culture se situait davantage entre la Turquie et le Caucase : on quittait alors le monde de l’Islam avec le chant des imams qui rythmaient nos journées avec le retour aux églises, et surtout le monde « russe ».

Les visages changent, on ne parle en Arménie pas plus anglais qu’en Georgie mais toujours autant le russe. Si bien qu’on mélange les mots arméniens et russes sans savoir quelle langue nous parle les gens. On excelle surtout dans les mimes et ça marche bien. On regrette de ne pas connaître un peu plus le russe pour apprendre un peu plus des gens, mais il faut encore qu’on apprenne notre petit livre de communication russe. Ca nous a motivés pour nous y mettre avant l’Asie Centrale en tout cas !

En Arménie, c’est aussi le retour du « Turkish coffee » qu’on avait découvert dans les balkans. En Grèce, on l’appelait « Greek cofee », en Turquie on n’en a jamais bu et ici c’est l’ « Armenian coffee » 🙂 Fini aussi les çay toutes les heures. C’est quelque chose qui nous manque rapidement. Mais ici, comme en Géorgie on redécouvre la bière et surtout la vodka ! Véritable substitut de l’eau surtout pour les locaux ! 😀

Tout est prétexte pour se faire un petit cul sec de vodka : l’amitié franco-arménienne, le fait qu’on soit des « brothers, à l’Arménie, à la France, au Karabagh, à Poutine, à Sarkozy (qui est très connu ici pour ses propositions de textes pour « réprimer la négation » du génocide arménien). On nous a même proposé de la vodka à 10h du matin alors qu’on voulait juste chercher un peu d’eau. Bref ici, il faut la jouer filou pour ne pas terminer « torchon » sur son vélo !

 

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Pralinette est prête pour la chasse !

La Russie a très bonne image en Arménie, les gens regardent la TV russe, l’armée russe est présente sur les frontières, la plupart des gens parlent russes et nous vantent la puissance de Poutine en tant qu’ »homme fort » … et hop une petite vodka pour Poutine ! 🙂

Il faut aussi avouer qu’être français en Arménie, c’est un véritable facteur de sympathie, les arméniens aiment beaucoup la France, on nous parle souvent d’Aznavour et aussi de Zidane. Ce dernier n’a rien à voir mais les gens l’aiment beaucoup aussi ^^

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On sait aussi qu’on est dans un pays de l’ex-URSS avec le réseau de gaz « visible » comme à Berlin-est. Au début cela nous surprend, et au bout de quelques jours on s’habituent très vite, et on trouve cela utile pour poser ses vélos pour faire une petite pause. En effet, les tuyaux de gaz sont hors de terre, ce qui donne des paysages parfois rigolos avec des ponts de tuyaux, des entrées pour voiture contournées par les tuyaux.

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Le dédale de tuyaux

Pour arriver au Lac Sevan, un petit col s’offre à nous avec un tunnel qui en coupe la fin. Deux arméniens se proposent de faire « bouchons » et rouler derrière nous pour qu’on soit tranquilles dans le tunnel 🙂 Sympa ces arméniens ! Petzel sur le front, c’est parti pour le tunnel avec notre escorte derrière nous. Flaques, trous, et eau qui coule du plafond pour rythmer notre courte aventure dans le noir.

A l’arrivée les gardiens du tunnel nous accueillent dans leur poste de sécurité qui fait aussi office de serre pour les plantes. Quelques bouteilles de vodka sont posées sur la table, on nous sert café, pain, viande et vodka pour Martin qui a désormais appris à faire semblant de boire !

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On s’est offert une petite pause au lac Sevan mais nous avons été extrêmement déçu. A cette période de l’année, le printemps n’est pas encore là à 1900m d’altitude, si bien que la nature est assez triste : pas de végétation, très peu d’arbre.

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Monastère à Sevan

La zone est très poussiéreuse, il y avait énormément de vent, et beaucoup de détritus sur le bord du lac, des sacs plastiques et bouteilles de bière sur la route…  On roulait à 6km/h, petit plateau grand pignon (même effort que pour grimper un col à 14% !).

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Les décharges à ciel ouvert montrent à quel point le plastique est une catastrophe… Et ici pour tout et n’importe quoi les commerçants emballent dans des sacs plastiques. Et ils sont très étonnés quand on refuse !

Bref, on en a bavé pour sortir de là. On a par contre bien rigolé lorsque Martin a demandé un second chauffage dans notre petite chambre (il faisait 7°C), et la tenancière lui a sorti un grand NIETOU ! (A priori c’est du russe 😀 )

L’Arménie c’est aussi le paradis des Lada ! Pas besoin d’aller à Cuba pour voir des vielles voitures 😀

On goûte aussi à la joie des markets où l’on trouve essentiellement de la vodka, des biscuits et des petites friandises pour accompagner le café (véritable institution ici). Dans les petits villages en montagnes, on peut se procurer une bonne vingtaine de vodka différentes, mais il est parfois difficile d’avoir un petit peu de pain ou d’eau 🙂 Mais les petits villages sont aussi l’occasion de goûter aux fromages frais et bon miels locaux (les deux ensemble nous font tous nos petits déjeuner d’ailleurs).

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Vodka ou bonbons ?

Après le Lac Sevan, nous avons fait une petite escapade au Haut-Karabagh qui fera l’objet d’un article à part. Ce sera l’une des plus belles parties de notre périple en Arménie avec la réserve de Shikahogh.

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En suivant les conseils d’Anne et Pierre-Alain qui avaient parcouru la Géorgie, Arménie, Iran et Oman en tandem (ceux qui nous ont prêté la Bête l’année dernière) nous sommes allés au monastère de Tatev avec sa petite ascension sur piste qui nous a laissé de bons souvenirs de pentes à 14%. La Bête (petit nom que nous avons donné au tandem) a dû souffrir à l’époque ! Heureusement que ses plateaux étaient en bon état en Arménie, car ici, le plat n’existe pas 🙂

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Monastère de Tatev

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On a croisé plein de cochons, chevaux, vaches, ânes, poneys en liberté dans les villages

La fin de notre traversée de l’Arménie se termine dans le canyon de l’Araxe – frontière naturelle entre Iran et Arménie. Le changement de paysage et de température est radical après seulement un col passé. On sent qu’on se rapproche de l’Iran et de l’Asie centrale. Et on est tout excités d’y arriver !

Avant d’arriver à la frontière on croise une voyageuse à vélo qui vient de Singapour avec laquelle nous échangeons quelques tips sur l’Iran et le Caucase.

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Avant de quitter l’Arménie, le long de la frontière, nous avons le droit à un dernier contrôle par des militaires (russes ? arméniens ?) qui nous demandent nos visa. Petit moment d’hésitation car en tant que Français nous n’en avons pas besoin. Les soldats regardent sur internet, appellent leur chef. Oui c’est vrai les « françouses » n’ont pas besoin de visa en Arménie. Puis ils demandent à Martin son appareil photo qui a eu le malheur de prendre en photo les paysages montagneux iraniens depuis l’Arménie… « Niet foto ! » : pas de photos de la rivière qui fait office de limite naturelle entre les deux pays. Le soldat se met à regarder toutes nos photos depuis le début… La discussion se fait par traduction vocale du russe au français via google. C’est assez rigolo ! Bref, pendant les 10 prochains km, on se sent surveillé par tous les miradors russo-arméniens qui bordent l’Araxe ! L’Asie centrale se rapproche 🙂

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L’Arménie nous laissera de très jolis souvenirs avec une nature magnifique surtout en cette période printanière, les loups la nuit, de jolies courbatures car pas une seule journée sans un col ou plusieurs côtes avec des moyennes à 8-9% et des pics à 14%. Et aussi pour la simplicité et la gentillesse des gens. Encore un pays où il fait bon être cyclo-voyageur 🙂